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Choix de vie

Le prix de la liberté

Rosa Luxemburg, en marge du Congrès socialiste international de Stuttgart de 1907.

Rosa Luxemburg vécut de 1871 à 1919. On se souvient aujourd’hui d’elle comme d’une correspondante passionnée et d’une révolutionnaire radicale. Souvent, c’est sa mort violente qui retient l’attention, occultant son œuvre et sa vie. Dans un monde où dominait l’esprit clérical, patriarcal, militariste, nationaliste et sectaire, elle fit des choix extraordinaires pour une femme de son époque : à 17 ans, elle emménage en Suisse ; à 22 ans, elle fonde son propre parti ; à 27 ans, elle obtient son doctorat, préférant s’établir à Berlin plutôt qu’à Paris, alors capitale intellectuelle de l’Europe ; à 28 ans, elle dirige son premier journal ; à 33 ans, elle est emprisonnée – et ce n’est qu’un début ; la même année, elle critique publiquement Lénine et les bolcheviks ; à 47 ans, son corps est jeté dans le Landwehrkanal à Berlin.

1 L’émigration à 17  ans Etudier à tout prix – Rosa Luxemburg s’installe à Zurich

Varsovie, vers 1900. Enfant, Rosa Luxemburg « croyai[t] fermement que la « vie », la « vraie » vie, était quelque part au loin, là-bas, par-delà les toits. Depuis lors, je voyage à sa recherche, mais elle reste cachée par-delà d’autres toits. » (Lettre à Luise Kautsky, 1904)

Rosa Luxemburg est issue de la bourgeoisie éduquée, sans grande fortune mais soucieuse non seulement d’encourager mais aussi de vivre au quotidien la culture et l’ouverture au monde. Née en 1871 à Zamość, une petite ville du sud-est de l’actuelle Pologne datant de la Renaissance, la famille s’établit dans la grande ville de Varsovie deux ans plus tard. Rosa Luxemburg obtient son baccalauréat avec mention. Le projet parental de marier leur fille tombe à l’eau, parce que la famille ne peut fournir une dot suffisante. En 1888, sa famille et les autorités tsaristes autorisent celle qui n’est alors encore qu’une jeune fille à émigrer en Suisse, réalisant son rêve d’entamer des études universitaires. Une démarche qu’on dirait aujourd’hui authentiquement féministe.

Lina et Eliasch Luxenburg. Rosa Luxemburg est issue d’une famille de rabbins du côté de sa mère. Ses parents vivent un judaïsme libéral éclairé. Quand Rosa Luxemburg a trois ans, la famille emménage à Varsovie – pas, comme beaucoup de Juifs réformés, dans le ghetto, mais dans un « quartier chrétien » tout proche. C’est ainsi que la famille échappe au pogrom qui suit la tentative d’assassinat du tsar russe en 1881.
Rosa Luxemburg, à douze ans. Enfant, Rosa Luxemburg développe une malformation de la hanche à la suite d’un traitement médical inapproprié. C’est donc seule, et alitée, qu’elle apprend à lire. Dans la maison de ses parents, on lit le polonais, l’allemand et le français. Le russe, langue de l’occupant, doit servir à passer le baccalauréat. Tandis que sa mère chérit la littérature française, son père lit les auteurs allemands. Goethe devient un compagnon fidèle de Rosa Luxemburg ; le soir de son assassinat, avant son interrogatoire à l’Eden Hotel, elle est encore plongée dans Faust II.

Rosa Luxemburg avec la famille de son frère Mikolai à Berlin, Pâques 1902. Les Luxemburg ont eu deux filles et trois fils, Rosa étant la benjamine. Alors que ses parents appartenaient encore à une bourgeoisie instruite pour laquelle l’économie capitaliste était source d’ennuis financiers, les fils deviennent des entrepreneurs et des universitaires prospères. La famille est éparpillée dans toute l’Europe. Les Luxemburg sont des citoyens du monde ; il y a peu de place chez eux pour le nationalisme.

2 Des études de zoologie avortées La passion de la politique

Zurich, ancienne université (aujourd’hui École polytechnique fédérale), 1890. Comme la charte de l’université, fondée en 1833, ne spécifie pas le sexe des étudiant⋅e⋅s, l’Université de Zurich devient, en 1840, le premier établissement d’enseignement supérieur d’Europe continentale ouvert aux femmes.
La thèse de doctorat de Rosa Luxemburg, publiée en 1898, participe à son engagement politique. Sous son titre anodin – « Le développement industriel de la Pologne » – la thèse est avant tout consacrée à l’émergence de la classe ouvrière, que Rosa Luxemburg voudrait voir s’engager dans la lutte contre le tsarisme et le capitalisme.

Zurich. Dans les mansardes sans chauffage de la provinciale Zurich, une communauté anticapitaliste a émergé dans le dernier tiers du 19e siècle, suite à l’immigration d’étudiant⋅e⋅s d’Europe de l’Est. Mais contrairement à beaucoup de ses camarades, notamment les Russes et les Polonais, Rosa Luxemburg n’est pas une exilée ; c’est volontairement qu’elle était arrivée là. Elle est donc chez elle dans les deux sociétés de Zurich. Rosa Luxemburg commence par étudier la zoologie ; trois ans plus tard, elle a non seulement bifurqué vers les sciences politiques, mais elle s’est prise de passion pour un homme, d’abord, puis pour la politique. Avec son amant Leo Jogiches et deux autres amis, Julian Marchlewski et Adolf Warski, elle fonde la Social-démocratie de Pologne en 1893. En 1905, peu avant leur séparation, elle écrira à Jogiches : « … et que je t’ai haï de m’avoir transmis à jamais cette maudite passion de la politique ! » [1]

1 Rosa Luxemburg à Leo Jogiches, 20 octobre 1905, dans : Gesammelte Briefe, vol. 2, 3. éd. revue et augmentée, Berlin 1999, p. 209.

Leo Jogiches (1867-1919). Issu d’une famille de banquiers juifs, il émigre en 1890. Leader de la Social-démocratie polonaise, il entame des études de zoologie, qu’il mène à terme. En tant que représentant de la Social-démocratie du Royaume de Pologne et de Lituanie (SDKPiL, jusqu’en 1900 SDKP) soumise à l’autorité de la Social-démocratie russe (1906-1912), il devient l’adversaire de Lénine. Pendant la Première Guerre mondiale, il organise la résistance antimilitariste en Allemagne. Il sera assassiné huit semaines après Rosa Luxemburg, dans la prison de Moabit.
Rosa Luxemburg, 1895, vraisemblablement à Paris. Naguère sujette – pas franchement assujettie – du Royaume de Pologne, Rosa Luxemburg est désormais une citoyenne sûre d’elle-même en Europe occidentale. Elle appartient à ce type de citoyens nés de la Révolution française qui ne se sont jamais sentis chez eux en Allemagne.

Premier numéro de la « Sprawa Robotnicza » (« La cause ouvrière »), organe de la Social-démocratie du Royaume de Pologne (SDKP) distribué illégalement dans l’Empire tsariste, à partir de juillet 1893. Le journal est né à Zurich mais est composé et imprimé à Paris. En juillet 1896, un total de 25 numéros a paru. Rosa Luxemburg s’y forge une solide expérience rédactionnelle, en écrivant anonymement plus de 30 contributions, aujourd’hui authentifiées. Après le démantèlement par la police tsariste des structures du SDKP en Pologne, le journal doit cesser de paraître.

3 Rosa Luxemburg entre sur la scène européenne Le choix de la contradiction

Avec August Bebel en 1904 lors du 6e Congrès socialiste international, à Amsterdam. Pour sa participation à ce congrès, Rosa Luxemburg a reçu un double mandat du SPD et de la Social-démocratie du Royaume de Pologne et de Lituanie (SDKPiL). Elle est élue au Bureau socialiste international. August Bebel (1840-1913), avec Wilhelm Liebknecht, fut le fondateur (1869) et principal représentant de la social-démocratie allemande et internationale jusqu’à sa mort.

Après avoir soutenu sa thèse, Rosa Luxemburg s’installe à Berlin en 1898 et se met à faire de l’agitation pour le SPD dans les régions de Pologne occupées par la Prusse. Par là, elle espère aussi s’adresser aux régions polonaises sous domination russe. Elle ne peut toutefois imaginer qu’elle sera propulsée, en l’espace de quelques mois, sur la scène de la social-démocratie européenne. Dans son article « Réforme sociale ou révolution ? » (1899), Rosa Luxemburg s’oppose à la tentative d’Eduard Bernstein de « réviser » les thèses marxistes, ferraillant contre une des plus éminentes autorités de la gauche (Bernstein est notamment l’exécuteur testamentaire de Marx et Engels). Alors que, deux ans plus tôt, Rosa Luxemburg a eu besoin de l’aide de la plus jeune fille de Karl Marx, Eleanor Marx Aveling, pour être admise, elle et son parti, à un congrès de l’Internationale socialiste, cette jeune Juive de 28 ans vivant dans une chambre d’étudiant à Zurich devient, à l’occasion de cette controverse, une personnalité européenne de premier plan. Pourtant, elle comptera plus d’ennemis que d’amis tout au long de sa vie, préférant ses convictions à la discipline de parti.

Bâle, 1898. Afin d’obtenir la nationalité prussienne pour se prémunir contre tout risque d’expulsion vers la Russie, Rosa Luxemburg conclut un mariage blanc, qui durera jusqu’en 1903, avec le fils de sa première logeuse à Zurich, le typographe Gustav Lübeck (1873-1945).
« Réforme sociale ou révolution ? » (1899). Les deux termes de « réforme » et de « révolution », qui apparaissent alors comme antagoniques, et structurent la fameuse controverse avec Bernstein au sujet du « révisionnisme », sont aux yeux de Rosa Luxemburg un couple complémentaire. L’exigence de la social-démocratie doit être, tout en menant des réformes, de maintenir le cap révolutionnaire. C’est ce qu’on appellerait aujourd’hui un « pragmatisme révolutionnaire ».
Eduard Bernstein (1850-1932). Accusée, lors de la controverse sur le révisionnisme, d’être une « jeune recrue présomptueuse faisant la leçon aux anciens de la lutte », Rosa Luxemburg répond : « Je suis consciente que j’ai encore tout à prouver dans le mouvement en Allemagne ; mais je veux le faire sur l’aile gauche, où on lutte contre l’ennemi, et non sur la droite, où l’on veut se compromettre avec lui […]. » (Rosa Luxemburg : Discours au Congrès du parti de la démocratie sociale de 1898, à Stuttgart, dans : Gesammelte Werke, vol. 1/1, Berlin, 1970, p. 238)
Le Bureau socialiste international (BSI), élu à Amsterdam en 1904, auquel Rosa Luxemburg – au milieu d’une majorité d’hommes âgés – a siégé jusqu’en 1914. Le rôle du BSI était de coordonner le travail de l’Internationale socialiste entre les congrès.
Berlin, Unter den Linden, vers 1900. Peu après son arrivée à Berlin, Rosa Luxemburg écrit : « Berlin me fait généralement la plus mauvaise impression : froid, insipide, massif – une vraie caserne ; et ces chers Prussiens, avec leur arrogance, raides comme si chacun d’entre eux avait avalé le bâton avec lequel on l’a rossé autrefois ». (Rosa Luxemburg à Mathilde et Robert Seidel, 30 mai 1898, dans : Gesammelte Briefe, vol. 1, Berlin, 1982, p. 136)

4 Parler haut et clair Le choix de ne pas se laisser museler

Rosa Luxemburg, Deutz 1910. Brillante oratrice, Rosa Luxemburg remplissait les plus grandes salles et places où – sans les moyens techniques d’aujourd’hui – sa voix portait parfois difficilement. Ici, pendant la campagne électorale de 1910.

Ferdinand Lassalle, le fondateur du mouvement ouvrier indépendant allemand, a un jour déclaré que l’acte le plus révolutionnaire était de « toujours dire tout haut ce qu’il en est ». C’est ce à quoi s’efforce Rosa Luxemburg depuis son entrée en politique – que ce soit dans ses articles, dans ses discours publics, ou dans sa défense devant les tribunaux. Rosa Luxemburg passera au total quatre des 48 années de sa vie en prison. Sa première incarcération date de 1904 : elle est envoyée à la prison de Zwickau pour lèse-majesté. En 1906, elle fait trois séjours dans des prisons de Varsovie pour sa participation à la révolution russe. En 1907, pour « incitation à la violence », elle connaît sa première incarcération à la prison pour femmes de la Barnimstraße (Berlin). En 1915, elle y est de retour une année entière, cette fois pour incitation à la sédition. En 1916, et jusqu’au 9 novembre 1918, elle est incarcérée au dépôt de police de l’Alexanderplatz (Berlin), puis de nouveau dans la Barnimstraße, ainsi qu’à la prison de Wronki, près de Posen ; puis de nouveau, en 1917, dans la prison de Breslau, pour ses actions répétées dans la lutte antimilitariste. En dépit de toutes ces incarcérations, Rosa Luxemburg n’a jamais hésité à dire ce qu’elle pensait être juste.

Dessin de Rosa Luxemburg. Sillonnant l’Europe – notamment pour donner des conférences –, elle passe presque autant de temps dans les trains qu’en prison. Parfois, elle profite de ces longs trajets pour dessiner ; une activité qui participe aussi de sa stratégie de survie en prison, pendant la guerre.

Journaliste brillante, Rosa Luxemburg ne l’est pas seulement en tant qu’autrice d’articles, mais aussi en tant que rédactrice en chef. Elle est la seule à diriger successivement les rédactions des trois plus grands journaux sociaux-démocrates : le Sächsische Arbeiterzeitung (Dresde) en 1898, le Leipziger Volkszeitung en 1902, et le journal central du parti Vorwärts (Berlin) en 1905. Et c’est parce que les rédacteurs masculins se sentent écrasés par cette femme brillante qu’elle finira par être écartée des deux premiers postes.
En 1898, Rosa Luxemburg écrivait à propos de la rédaction d’articles pour la presse du parti : « Je ne suis pas satisfaite de la façon dont les articles sont généralement rédigés au sein du parti. Tout cela est si conventionnel, si guindé, si stéréotypé. […] Il faudrait pouvoir, à chaque fois, chaque jour, pour chaque article, revivre ce dont on parle et le sentir à nouveaux frais. Alors, peut-être, nous viendraient des mots nouveaux, des mots sincères, pour évoquer nos vieilles lubies […] ». (Rosa Luxemburg à Robert Seidel, 23 juin 1898, dans : Gesammelte Briefe, vol. 1, Berlin, 1982, p. 153)

5 Adieu la midinette berlinoise Le choix de la révolution

Saint-Pétersbourg, devant le Palais d’Hiver, janvier 1905. Jusqu’en 1904/05, il est admis dans le monde entier, d’une part, que l’armée russe est invincible en Asie et, d’autre part, que la Russie restera « sans histoires », les Russes semblant endurer un pouvoir inique sans la moindre opposition. Les victoires de l’armée japonaise démentent non seulement la première hypothèse, mais plongent la Russie dans une crise économique qui fait exploser cette poudrière supposément « sans histoires ». Mais, pour cette fois, la révolution est étouffée.




La révolution russe qui éclate à Saint-Pétersbourg en janvier 1905 s’étend rapidement à tout l’Empire, y compris aux régions industrialisées de Pologne sous occupation russe. Dans des articles presque quotidiens, Rosa Luxemburg, qui travaille à Berlin comme rédactrice en chef de l’organe central du SPD, Vorwärts, tente de convaincre la social-démocratie allemande de l’importance des événements – avec peu ou pas de succès. Fin décembre 1905, lasse, elle quitte ce travail, aussi bien payé qu’inoffensif, contre une vie clandestine à Varsovie. Le 4 mars 1906, la veille de son 35e anniversaire, Rosa Luxemburg est arrêtée avec son compagnon Leo Jogiches. Elle est emprisonnée jusqu’à la mi-juillet, entre autres dans le tristement célèbre « Pavillon X » de la citadelle de Varsovie, réservée aux « prisonniers politiques ».

Varsovie 1905, grève des distributeurs de journaux. À Berlin, auprès de Luise et Karl Kautsky, Rosa Luxemburg témoigne, avec sobriété et sans illusion, du climat régnant : « …d’énormes difficultés avec les imprimeurs, des arrestations quotidiennes et des menaces d’exécution. […] Un chaos indescriptible dans l’organisation, des conflits entre factions malgré tous les accords, et une dépression générale. Pourvu que cela reste entre nous ». (Rosa Luxemburg à Luise et Karl Kautsky, 5 février 1906, dans : Gesammelte Briefe, vol. 2, 3e éd. revue et augmentée, Berlin, 1999, p. 246 s.)
Décembre 1905 : éditorial de Rosa Luxemburg en première page de Vorwärts, au sujet des difficultés de la flotte tsariste dans la mer Noire.
À la prison de Varsovie, 1906. À Varsovie, Rosa Luxemburg – qui se fait passer pour une journaliste allemande du nom d’Anna Matschke – est interpellée puis incarcérée. Pour la libérer, sa famille et la direction allemande du parti – contre la volonté exprimée par Luxemburg, et sans l’en informer – versent une caution. C’est à cette période qu’elle écrit – avec enthousiasme, mais probablement aussi dans le souci de rassurer ses ami⋅e⋅s à Berlin : « La révolution est grande, tout le reste n’est que balivernes ». (Rosa Luxemburg à Mathilde et Emanuel Wurm, 18 juillet 1906, dans : Gesammelte Briefe, vol. 2, 3e édition revue et augmentée, Berlin, 1999, p. 259) 

6 La révolution, oui ; la terreur et les putschs, non Le choix d’une vie : le rejet de toute tentation totalitaire

Couverture de « Grève de masse, parti et syndicats ». Rosa Luxemburg écrit ce texte en 1906 pendant son séjour en Finlande, peu avant son départ pour le congrès du SPD. Sa demande d’inscrire la grève politique de masse au répertoire de la lutte des classes est fraîchement accueillie par les caciques du SPD. À cette époque, la social-démocratie a déjà depuis longtemps troqué une participation active de ses membres à la lutte des classes pour un travail parlementaire discret.

Après sa libération de la prison de Varsovie, Rosa Luxemburg se cache pendant un mois et demi sous le nom de Felicia Budilowitsch (« L’heureuse [ressuscitée] ») en Finlande, un pays également sous occupation russe mais gouverné de façon beaucoup plus libérale. De là, elle rend plusieurs visites – sans être repérée – à ses camarades Léon Trotsky, Alexandre Parvus et Leo Deutsch dans la prison de Saint-Pétersbourg ; elle engage aussi de longues discussions avec Lénine et son entourage, également exilés en Finlande, à propos de la révolution tout juste écrasée. Et une chose semble claire : s’ils s’accordent sur le caractère nécessaire de la révolution, ils s’opposent à jamais sur la manière de la mener – notamment sur l’emploi de la terreur révolutionnaire. Pour Rosa Luxemburg, la grève politique de masse, dont elle a constaté les succès tactiques lors de la révolution, et qu’elle espère voir reprise en Allemagne dans la lutte pour l’instauration d’une République, reste le meilleur moyen de mener le combat.

Les chemins de la révolution : Lénine (à l’état civil : Vladimir Ilyich Oulianov, 1870-1924). À l’été 1917, avant de mener le coup d’État d’Octobre, Lénine (ici déguisé) est de nouveau contraint à l’exil clandestin en Finlande. Rosa Luxemburg note : « Les bolcheviks vont probablement encore se fourvoyer. Mais on peut leur appliquer le dicton […] à propos du noble cheval qui ne fait jamais plus d’étincelles sur les pierres que lorsqu’il trébuche. Et l’histoire en jugera certainement plus tard, comme le vieux Ziegler l’a fait sur la tombe de Lassalle : “C’était un homme avec mille travers et bien des défauts, mais c’était un homme entier.” » (Rosa Luxemburg: Nicht nach Schema F. Dans : Spartacus, n° 8, janvier 1918 ; republié dans : Paul Levi : Ohne einen Tropfen Lakaienblut. Schriften, Reden, Briefe, vol. I/1 : Spartakus, éd. Jörn Schütrumpf, Berlin, 2018, p. 448)
Les chemins de la révolution : Félix Dzerjinski (1877-1926) – à partir de 1900, il dirige, avec Rosa Luxemburg et Leo Jogiches, la Social-démocratie du Royaume de Pologne et de Lituanie, un parti qui reflète les positions démocratico-socialistes de Rosa Luxemburg. Dzerjinski rejoindra les bolcheviks en 1917, puis deviendra chef des services de renseignement, symbole de la « terreur rouge » préconisée par Lénine.
Les chemins de la révolution : Alexandra Kollontaï (1872-1952). Militante révolutionnaire pour les droits des femmes. En 1917, commissaire du peuple (ministre) pour la protection sociale, elle fait adopter une loi qui dépénalise l’avortement. En 1921, elle prend la tête de l’« opposition ouvrière » contre Lénine et Trotsky. Elle sera par la suite mise au placard dans un service diplomatique. Parmi les compagnons de route de Lénine, c’est une des rares à avoir survécu à la terreur stalinienne.
Les chemins de la révolution : Angelica Balabanoff (1869-1965). Dirigeante du Partito Socialista Italiano en 1912, c’est une alliée de Clara Zetkin, Leo Jogiches et Rosa Luxemburg, qui coordonne le mouvement anti-militariste international de Zimmerwald pendant la Première Guerre mondiale. En 1919, nommée « secrétaire », elle devient une figure de proue de l’Internationale communiste. En 1921, elle rompra avec les bolcheviks et émigrera.
Les chemins de la révolution : Parvus, Trotsky et Leo Deutsch à la prison à Petersbourg en 1906. Leo Deutsch (de son vrai nom : Lev Grigorievich Deitsch, 1855-1941) est, à partir de 1903, un des leaders mencheviks. Exilé de force à quatre reprises, il reviendra à chaque fois. Parvus (à l’état civil : Israel Lazarevich Gelfand, 1867-1924) deviendra marchand d’armes après la révolution de 1905-06. Trotsky (de son vrai nom : Lev Davidovitch Bronstein, 1879-1940) dirigera l’insurrection armée des bolcheviks en octobre 1917.

« Grève générale ! » La grève générale la plus célèbre et la plus victorieuse d’Allemagne n’aura lieu qu’après l’assassinat de Rosa Luxemburg, en 1920, pour repousser le fameux « putsch de Kapp ». En République fédérale d’Allemagne, la « grève politique » est encore de nos jours considérée comme illégale. Quand le mouvement Fridays for Future appelle aujourd’hui à une grève mondiale pour le climat, il reprend en substance l’idée de grève de masse promue et théorisée par Rosa Luxemburg.

7 Libération Le choix d’aimer et de vivre en toute liberté

Clara Zetkin-Zundel et Rosa Luxemburg à Magdebourg en 1910 : « Les deux derniers grands hommes de la social-démocratie » (Rosa Luxemburg) … étaient des femmes.

La relation de Rosa Luxemburg avec Leo Jogiches a déjà pris fin lorsqu’éclate la révolution russe de 1905-06. À sa sortie des geôles russes, Luxemburg met fin à cette première grande histoire d’amour, devenue délétère. C’est tout un drame : la menace de Jogiches de la tuer elle et son nouvel amant, Constantin Zetkin, avant de se donner la mort, est prise suffisamment au sérieux pour que Rosa Luxemburg en vienne à acquérir un revolver. Au-delà de ces péripéties, c’est un nouveau chapitre de la vie de Rosa Luxemburg qui commence. Elle est désormais établie dans cette ville de Berlin jadis exécrée, et fréquente de nouveaux amis et de nouveaux amants. Elle continue de travailler « comme une forcenée », écrit de nombreux articles en plusieurs langues pour divers journaux, a une activité épistolaire intense au sein d’un réseau européen de correspondant⋅e⋅s, participe à des conférences et autres congrès, et part régulièrement en tournée dans tout le pays. Pour Rosa Luxemburg, l’action politique suppose l’éducation politique. À partir de 1907, elle assume chaque hiver un semestre de cours en économie politique à l’école centrale du SPD. Outre que son salaire (3000 RM par ans) lui permet désormais de vivre correctement, c’est un travail qui l’inspire : de sa charge d’enseignement naîtront ses deux principaux ouvrages d’économie, « Introduction à l’économie politique » et « L’Accumulation du capital », une tentative d’appliquer la pensée de Marx au-delà de l’idéologue qui fait encore des émules aujourd’hui.

École centrale du SPD, 1910. Rosa Luxemburg (dernier rang) est la seule femme du corps enseignant. Sa grande popularité auprès des étudiant⋅e⋅s tient sans doute en partie à son approche pédagogique : « De la première à la dernière leçon, nous nous sommes efforcés de transmettre ce message : vous n’êtes pas au bout du chemin, vous apprendrez encore, vous devez continuer d’apprendre tout au long de votre vie ». (Rosa Luxemburg : École syndicale et école du parti, dans : Gesammelte Werke, vol. 2, Berlin, 1972, p. 552)
Rosa Luxemburg et Luise Kautsky en vacances en Suisse, été 1909. Luise Kautsky (1864-1944) fera vivre dans la société la mémoire de son amie assassinée.




« L’époque où j’écrivais L’Accumulation… est l’une des plus heureuses de ma vie. Je vivais dans une sorte de frénésie, n’ayant d’yeux et d’oreilles, jour et nuit, que pour cet unique problème qui se dépliait si clairement devant moi ; et je ne sais pas ce qui me procurait le plus grand plaisir : le mouvement de ma pensée, lorsque je tentais de débrouiller une question en arpentant la pièce de long en large […], ou la conception elle-même, la mise en forme littéraire, plume en main  » [2]

2 Rosa Luxemburg à Hans Diefenbach, 12 mai 1917, dans : Gesammelte Briefe, vol. 5, Berlin, 1984, p. 234.

Parmi ses nouvelles relations, c’est son histoire avec Constantin Zetkin (1885-1980), le fils de son amie Clara Zetkin, qui passionne le plus Rosa Luxemburg. De quatorze ans son aînée, elle est d’abord auprès de lui une professeure, une amie, puis une amante. Elle partage avec lui pensées, peines et joies. Après leur séparation, elle écrira : « … et je crois toujours ceci : que le caractère d’une femme se révèle non pas quand l’amour commence, mais quand il finit. » (Rosa Luxemburg à Mathilde Jacob, 9 avril 1915, dans : Gesammelte Briefe, vol. 5, Berlin, 1987, p. 54)
Rosa Luxemburg dans son appartement (1907). Jusqu’à son assassinat, elle résidera aux adresses suivantes :
1898/99 : Cuxhavener Straße 2 (Mitte) ;
1899 : (Wilhelm-)Hauff-Straße 4 (Friedenau), Lützowstraße 51 ;
1899-1901 : Wielandstrasse 23 (Friedenau) ;
1901-1911 : Cranachstraße 58 (Friedenau) ;
1911-1919 : Lindenstraße 2 (Südende).
La colocataire la plus fidèle de Rosa Luxemburg est un chat, qu’elle adopte après l’avoir trouvé dans un sale état, et baptise « Mimi ». Le souhait de Rosa Luxemburg d’avoir des enfants ne sera jamais exaucé.
 

8 J’aime mieux aller en prison que plaider la clémence Le choix de faire face, seule contre (presque) tous

À l’été 1914, Rosa Luxemburg et ses avocats (ici Paul Levi, une de ses liaisons de l’époque, et Kurt Rosenfeld) mettent l’État militaire prussien sous pression, en présentant à la cour 30 000 témoins d’abus commis sur des soldats. Cependant, ce succès, qui est aussi une de ses plus grandes percées médiatiques, n’empêche en rien le déclenchement imminent de la guerre.
En réponse à l’accusation, qui réclamait un mandat de dépôt en raison d’un « risque de fuite », Rosa Luxemburg répond : « Monsieur le Procureur, je suis d’accord, le risque existe que vous preniez la fuite. Mais un social-démocrate ne fuit pas, il reste fidèle à ses actes et se moque de vos verdicts ». (Rosa Luxemburg : Verteidigungsrede vor der Frankfurter Strafkammer  [Discours de défense devant la Cour pénale de Francfort], dans : Gesammelte Werke, vol. 3, Berlin, 1973, p. 406) Après la condamnation, Rosa Luxemburg et ses deux avocats effectuent une tournée de conférences dans tout l’Empire – par exemple, comme annoncé ici, au Kindl-Keller de Munich le 21 mars 1914.

Outre la lutte pour le suffrage universel égalitaire dans les Länder allemands et l’engagement en faveur de la république, il est une position de Rosa Luxemburg qui la distingue et l’isole : la lutte, de plus en plus pressante, contre la militarisation de la société et une guerre mondiale à venir, processus et perspective contre lesquels Rosa Luxemburg, comme son camarade Karl Liebknecht, met très tôt en garde. Sa tentative d’intégrer la grève de masse au répertoire des outils tactiques de la social-démocratie se solde toutefois par un échec.

Karl Kautsky (1854-1938) est le symbole à la fois de l’essor et de la ruine de la social-démocratie européenne. Théoricien et publiciste, il a considérablement façonné l’Internationale socialiste. Dès avant la guerre, le refus de Rosa Luxemburg de renoncer à l’option révolutionnaire creuse un fossé bientôt abyssal entre les deux anciens amis.
Eine weltgeschichtliche Katastrophe: die Kapitulation der internationalen Sozialdemokratie – »Juniusbroschüre«
« Une catastrophe historique : la capitulation de la social-démocratie internationale ». Depuis sa prison, Rosa Luxemburg se livre à un bilan, qui sera publié sous le nom de « brochure de Junius ». (réimprimé dans : Rosa Luxemburg : Gesammelte Werke, vol. 4, 6e éd. revue, Berlin, 2000, p. 49-164).

Après la révolution russe de 1905/06, des antisémites polonais accusent Rosa Luxemburg et Leo Jogiches, tous deux juifs, d’avoir excité de bons et braves ouvriers chrétiens avant de fuir à l’étranger, laissant la Pologne à feu et à sang. C’est une des raisons qui, en 1914, pousseront Rosa Luxemburg à refuser, contre les recommandations de ses amis, l’émigration vers l’Allemagne après sa condamnation pour « incitation à la désobéissance ». Elle refusera également la grâce du Kaiser. Fin juillet 1914, la Première Guerre mondiale éclate ; peu de temps avant, l’Internationale socialiste – sur laquelle Rosa Luxemburg avait fondé beaucoup d’espoirs – s’est effondrée, presque sans faire de bruit. Le 18 février 1915, Rosa Luxemburg est enfermée dans une cellule de la prison pour femmes de la Barnimstraße (Berlin), pour un an.

La prison pour femmes de la Barnimstraße, à Berlin.
« Voyage à Paris », août 1914. Les premières semaines de la guerre voient Rosa Luxemburg presque totalement isolée : même ses plus intimes se sont transformés en patriotes belliqueux. Pendant cette guerre, la population allemande, contrôlée et opprimée avec une extrême brutalité par un État policier et militaire, s’appauvrira, tandis que les industriels de l’armement et autres profiteurs de la crise amasseront des fortunes.

9 Irréductible Le choix de se battre jusqu’au bout

La cellule de Rosa Luxemburg dans la prison de Wronki, en 1916/17. On l’autorise à cultiver son propre jardin floral dans la cour du pénitencier.

En février 1916, à peine sortie de prison, Rosa Luxemburg reprend son combat anti-militariste. Depuis le 1er janvier 1916 s’est formé autour d’elle un nouveau cercle, réuni sous le nom de « Gruppe Internationale », mais bientôt appelé tout simplement « Spartacus », du nom du journal que le groupe fait paraître illégalement, et pour lequel Luxemburg rédige des thèses programmatiques. La répression s’ensuit : moins de six mois après sa libération, Rosa Luxemburg est de nouveau placée en « détention préventive », sous régime militaire. Elle qui souffre d’une maladie de l’estomac doit aussi endurer des épisodes dépressifs – qu’elle soigne elle-même. À partir de l’automne 1917, dans des circonstances toujours plus funestes, il lui faut également, depuis sa cellule de Breslau, prendre soin du moral de ses amies en liberté. Ce seront les « Lettres de prison », un petit bijou du patrimoine littéraire universel, commandé par les circonstances. Un autre suivra, composé – toujours sous écrous – en octobre 1918 : le fragment sur « La révolution russe », publié en 1921/22, et qui reste aujourd’hui l’un des fondamentaux de la critique socialiste du bolchévisme.

Rosa Luxemburg envoie de nombreuses lettres à sa plus proche confidente, Mathilde Jacob (1873-1943), à qui elle transmet également des messages clandestins. Mathilde Jacob est, avec Leo Jogiches, l’organisatrice du groupe Spartacus. C’est elle qui, après l’assassinat de Luxemburg, prendra soin de conserver ses écrits et ses biens. Elle mourra au camp de concentration de Theresienstadt.
Le lien avec le monde extérieur est désormais essentiellement épistolaire – mais Rosa Luxemburg parvient aussi à faire passer de nombreux messages clandestins, qui échappent à la vigilance des censeurs. Ainsi, tous les articles de Rosa Luxemburg pour le journal « Spartacus » et le « Kampf » de Duisburg furent transmis illégalement. Les « Lettres de prison » connaîtront une grande fortune éditoriale, constante depuis un siècle. De cette période datent des textes qu’on place aujourd’hui au panthéon de la littérature universelle.
Extraits de l’herbier de Rosa Luxemburg, en 1912.
En prison, Rosa Luxemburg cultive sa passion pour la botanique, s’intéresse à la minéralogie, et poursuit ses recherches ornithologiques.
Le début de la guerre mondiale opère un rapprochement politique entre Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht (1871-1919), député au Reichstag. Ce dernier, avocat de son état, est devenu une voix importante pour cette gauche qui refuse la guerre. Son arrestation, le 1er mai 1916, ne suffit pas à le faire taire : Liebknecht encourage les peuples de tous les pays belligérants à résister au militarisme. Le co-fondateur du KPD sera assassiné le même jour que Rosa Luxemburg, le 15 janvier 1919.

10 Tout le pouvoir aux conseils Le choix de mener de front la révolution politique et la révolution sociale

Dernier parlement de l’Empire ou premier Parlement révolutionnaire ? Du 16 au 20 décembre 1918, le Congrès des Conseils d’ouvriers et de soldats de l’Empire se réunit à la Chambre des députés de Prusse (Berlin), sous l’égide de Richard Müller, le leader des « Revolutionäre Obleute » (délégués de la base ouvrière révolutionnaire, ayant rompu avec des directions syndicales jugées compromises), une organisation profondément démocratique qui s’oppose à la guerre.

La révolution russe de février 1917 provoque une onde de choc qui atteint l’Allemagne à l’automne 1918. La « révolution de Novembre » libère Rosa Luxemburg de sa cellule. À Berlin, elle prend la direction du journal Die Rote Fahne (« Le Drapeau rouge »). Alors que la direction du SPD tente de prendre la tête de la révolution pour l’étouffer, Luxemburg se retourne avec véhémence contre les cadres de son ancien parti. Le KPD (Parti communiste d’Allemagne), fondé au tournant des années 1918/19, adopte le programme que Rosa Luxemburg avait écrit pour la Ligue spartakiste. L’objectif de Luxemburg est de rendre irréversible la révolution de Novembre en Allemagne, et de faire de ce bouleversement politique un bouleversement social à long terme. Mais elle est vite réduite à l’impuissance, et les 68 jours de fièvre révolutionnaire se changent progressivement en furie pogromiste. Dès le mois de décembre 1918, des affiches incendiaires paraissent sur les murs. Et le 15 janvier 1919, des officiers allemands assassinent Rosa Luxemburg. Son corps ne sera retrouvé que le 31 mai.

Les « Revolutionären Obleute » (délégués révolutionnaires) incarnent le pouvoir des masses à Berlin ; ils représentent quelque 200 000 travailleur⋅se⋅s. Le Parti communiste d’Allemagne (ou Ligue spartakiste) de Rosa Luxemburg, en revanche, ne compte que 300 partisans dans la même ville au début de l’année 1919. Dans la soirée du 4 janvier, la majorité des Obleute appelle à protester contre la révocation du préfet de police Emil Eichhorn, appartenant à l’aile dissidente, plus radicale, de la social-démocratie (USPD), dont les spartakistes font partie jusqu’en décembre 1918. Bien que cet appel n’émane pas de Rosa Luxemburg et ses camarades, la légende de la « révolte spartakiste de Berlin » se perpétue encore aujourd’hui.
Procès-verbal de la conférence fondatrice du KPD (Parti communiste d’Allemagne). Rosa Luxemburg a jusque-là toujours refusé de quitter le SPD – ou, plus tard, le Parti social-démocrate indépendant (USPD), de tendance pacifiste, qui voit le jour en 1917, et auquel le groupe Spartacus adhère à contre-cœur. Cependant, lorsque Karl Radek, l’homme de Lénine en Allemagne, menace, à la fin de l’année 1918, de fonder un nouveau parti de gauche radicale avec de l’argent russe, Rosa Luxemburg réagit. Elle veut éviter que le sort de la gauche allemande tombe entre les mains des bolcheviks. Elle sort du rang, et crée un parti dont le nom échappera à ses tentatives de conserver la référence au « socialisme » ; et c’est ainsi que naît le « Parti communiste d’Allemagne ».
Affiche diffusée par la Ligue anti-bolchevique, fondée au début du mois de décembre 1918. Ce n’est pas seulement en tant que femme la plus influente de la gauche allemande que Rosa Luxemburg sera poursuivie, puis assassinée en 1919, mais aussi en tant que « Juive de Galicie (Pologne) ».

[Traduction de l’affiche : « Travailleurs ! Citoyens ! La patrie est au bord du gouffre. Sauvez-la ! La menace ne vient pas de l’extérieur, mais de l’intérieur : du groupe Spartakus ! Frappez ses dirigeants à mort ! Tuez Liebknecht ! La paix, le travail et le pain vous récompenseront ! Signé : Les soldats du front »]
« À l’hôtel Eden, les assassins trinquent » à la mort de Rosa Luxemburg, dénonce le Rote Fahne sur sa Une, quatre semaines après le meurtre. Le 10 mars 1919, Leo Jogiches est également assassiné dans un dépôt de police ; son assassin sera récompensé par une promotion.
Le mémorial, conçu par Ralf Schüler et Ursulina Schüler-Witte, au niveau du pont du Lichtenstein sur le Landwehrkanal, dans le Tiergarten (Berlin). C’est à cet endroit que fut jeté le corps de Rosa Luxemburg le 15 janvier 1919.

Pour en savoir plus sur les 68 derniers jours de la vie de Rosa Luxemburg, lisez cette chronique